John Forbes et John Charles Martin Nash

Etude de cas et commentaires Jack R Foucher

Hypothèses diagnostiques selon la CIM / DSM

Pour JF Nash, le diagnostic CIM-10, DSM 4R ou DSM 5 est cohérent avec celui donné lors de ses hospitalisations : schizophrénie. Sur le descriptif des épisodes le qualificatif de paranoïde semble approprié. Ces sous-types ont disparus de DSM 5 car jugé trop instables, ce qui est bien le cas ici, puisque sur la vidéo, Nash serait mieux décrit comme souffrant d'un forme résiduelle de la pathologie. Les symptômes résiduels correspondraient au manque d'expressivité et à l'adynamise global qui rappelons le ne seraient pas liés à la prise d'un quelconque traitement. Il semble qu'il lui arrive encore d'expérimenter quelques phénomènes hallucinatoires.

Il est plus difficile d'être aussi affirmatif sur la pathologie du fils, même si la présence d'hallucinations et d'un comportement bizarre de façon chronique incite là encore fortement au diagnostic de schizophrénie. Il nous manque un descriptif de l'évolution et l'éviction des critères d'exclusion de la pathologie.

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Hypothèse diagnostique selon la classification de WKL

L'histoire de la maladie racontée avec la séméiologie CIM/DSM est peu informative pour un diagnostic selon WKL. En effet, si JF Nash a présenté des symptômes psychotiques à type de délire et d'hallucination cela est observable dans pratiquement toutes les psychoses endogènes.
C'est en fait la vidéo qui permet de préciser le diagnostic. Celui-ci est difficile chez le père qui est en phase résiduelle de la pathologie, c'est à dire entre des épisodes. Néanmoins il semble que la pathologie évolue par accès et qu'il persiste des symptômes dans l'intervalle libre. Rien n'indique que Nash présentait le moindre signe d'atteinte neuro-développentale (maladresse, signes neurologiques mineurs, personnalité accentuée, dysmorphie...). On est donc selon toute probabilité confronté à une forme de schizophrénie non-systématisée. Sur le plan des symptômes résiduels, on observe un aspect adynamique de la motricité, surtout sur son versant expressif. Le visage de JF Nash est presque impassible et la gestuelle peu développée. Il faut pondérer cette dernière affirmation, car il n'est pas impossible que certaines postures aient été apprises pour contrôler les parakinésies. Celles-ci sont quasiment absente de la vidéo. Contrastant avec cette apparente hypo-expressivité, on aperçoit de façon fugace une expression exagérée, voir déformée au point d'en être presque grimaçante (à la fin de l'intervention de JF Nash et pendant qu'on interroge son fils, au moment ou il se frotte le nez). Il n'est malheureusement pas possible de s'assurer qu'aucune émotion cohérente y soit associé. Tout au plus peut-on observer que cette expression grimaçante n'est pas unique puisqu'elle se retrouve aussi dans la vidéo suivante, à nouveau coupée lors du montage.

L'ensemble est donc évocateur d'une catatonie périodique sous réserve d'un meilleur descriptif des épisodes.

Concernant le fils, JCM Nash, le symptomatologie est plus prononcée : le patient présente une instabilité psychomotrice (au sens de restlessness ou Unruhe c'est à dire absence de calme plus qu'une agitation véritable), il fume puis discute debout en marchant, ne reste que quelques minutes assis en se balançant par instant, puis décide de façon impulsive de partir sous le regard amusé de ses parents qui connaissent sans doute cette forme d'impatience. Il présente un mouvement plus ou moins stéréotypé de frottement du visage, des parakinésies de la partie haute du visage (en règle épargnées par les dyskinésies tardives, la règle voudrait qu'il n'en soit pas conscient) et des expressions grimaçantes.
Le mouvement de mou des lèvres est en revanche plutôt à analyser comme une dyskinésie tardive : il est stéréotypé, autrement dit ne change pas d'aspect à l'inverse des parakinésies. Il faudrait l'interroger pour savoir si ce mouvement le gène et s'il se sent capable de le contrôler ne fut-ce qu'un instant pour s'en assurer.

Chez JCM Nash, le diagnostic de catatonie périodique est plus évident, encore qu'il faudrait s'assurer que le reste de la symptomatologie soit bien compatible.

Ainsi, Père et fils souffrent très probablement d'une catatonie périodique. Il s'agit d'une pathologie bipolaire car pouvant s'accompagner aussi bien de phase d'hyperkinésie que de phase d'hypo, voir d'a-kinésie. Au passage, si on reprend la question d'Andreassen sur le géni dans la maladie mentale, on retrouve cette prédominance des formes bipolaires associées à la créativité. Le caractère familial de l'affection est bien documenté : jusqu'à 25% des apparentés du premier degré ont un phénotype identique quelque soit la cohorte étudiée. L'observation d'un début plus précoce chez l'enfant que chez le parent a aussi été documenté par l'équipe de Würzburg mais il n'a pas été identifié de lien avec un phénomène d'amplification de triplet. La longue rémission de Nash pose question. Nous ne l'avons observé que chez des patients sous lithium. Ce traitement parait peu efficace pour traiter l'épisode, mais remarquable pour éviter d'en faire un nouveau. Il semble aussi pouvoir bloquer l'évolution vers une accumulation de symptômes résiduels, qui chez certains patients prend la forme d'un tableau pseudo-démentiel. Les neuroleptiques à l'inverses, bien que très utiles pour calmer les symptômes, sont assez peu efficaces pour prévenir une rechute ou freiner l'évolution. Ce que le cas de JF Nash illustre bien, c'est qu'une période de rémission suffisamment longue offre la possibilité au patient de remonter la pente, même si persiste cet adynamisme incontournable et sans doutes quelques symptômes catatoniques à bas bruit (grimaces, parakinésies...). Ce point était rappelé par Leonhard lui-même et confirmé dans le suivit de l'équipe de Pethö.

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